Fjellstue & Preikestolen
706 m
Rogaland
Preikestolen, c’est un peu leur Tour Eiffel, les marches pour y accéder, la vue imprenable
Tout norvégien se doit d’y aller au moins une fois dans sa vie, comme pour tous les touristes qui viennent du monde entier pour fouler cette plateforme de 25 m par 25 m. En quelques mots, c’est une imposante falaise qui culmine à 604 mètres au-dessus des eaux du Lysefjord.
Preikestolen en norvégien, langue actuelle ou Prekestolen en bokmål (vieux norvégien) sont deux toponymes en norvégien qui signifient en français « La Chaire ». Sa forme mais aussi le fait que des sacrifices y auraient été pratiqués expliquent ce nom mais autrefois ce rocher était appelé Hyvlatånnå qui signifie « dent rabotée ». Voir encadré ci-dessous
© Photos & illustration : V. Thiebaut – Photos drone : Clément / the p adventure
Carnet de balade
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Orientation Ouest
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Difficulté Peu difficile
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Dangers Précipices - 100 m derniers mètres
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Départ Preikestolhytta à 5h30
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Météo Brume - Grand beau
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Compagnons Isabelle & Taïga
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Altitude départ 325 m
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Timing total 5 heures
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Refuge Preikestolenhytta
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Altitude max 706 m
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Distance AR 10,6 km
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Secours 112
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Dénivelé total 680 m
Preikestolen est incontournable comme destination touristique quand tu es dans le secteur. Ce n’est pas une expérience de randonnée en pleine nature où tu es seul au monde. Nous décidons d’agrémenter notre sortie avec 2 objectifs, se rendre à Preikestolen par le haut en empruntant une variante à la montée vers Fjellstue qui culmine à plus de 700 m et d’enchainer avec un sommet facile de l’autre côté du fjord avec vue sur la face, Sollifjellet.
Samedi, la météo est parfaite sur Stavanger, nous prenons les tunnels pour nous rendre de l’autre côté du fjord et à la sortie, une pluie battante nous accueille à Tau. Au programme aujourd’hui, Sollifjellet le matin, puis paddle et pique nique dans le fjord et montée sur le rocher en fin d’après-midi jusqu’à la nuit. Nous continuons notre route jusqu’au pont vers Forsand, mais les conditions ne s’améliorent pas malgré les prévisions qui devaient être bonnes. Une éclaircie est possible l’après-midi, mais il est 9 heures du matin. Nous décidons de rentrer et de retenter notre chance demain. Tourisme et paddle cet après-midi à Tungeneset.
Dimanche, nous nous levons à 4 heures du matin pour un départ 30 minutes plus tard, l’équipement et les sacs à dos sont déjà dans le coffre. Comme la veille, nous traversons les deux tunnels payants vers Jørpeland, le ciel est couvert mais les prévisions annoncées sont quasi parfaites. Contrairement à la veille, nous allons attaquer la journée avec la grimpette vers le rocher. Nous bifurquons vers la gauche, tout est clairement indiqué…2 immenses parkings accueillent les touristes. Il est un peu plus de 5 heures et nous ne sommes vraiment pas les premiers. Entre ceux qui sont arrivés la veille et ceux comme nous qui découvrons le site de bonne heure, les infrastructures sont importantes, mais très bien pensées. Attention le parking à proximité est payant, plus de 25 Euros… le prix du confort !
Avec Taïga, nous attaquons la montée par une sentier très large et quand cela devient raide par des marches népalaises (lire l’article). Tout est fait pour faciliter l’accès comme des sections en bois au-dessus des tourbières. Même si nous montons vraiment tranquillement, dans deux sections plus raides, nous sommes obligés de doubler pour garder notre petit rythme. Vers 530 m d’altitude, nous traversons un plateau, trois petits lacs reflètent le ciel bleu et là, nous sommes contents d’avoir renoncé hier.
Nous passons à côté de l’abri, puis à 200 m nous trouvons le panneau indiquant notre itinéraire bis, un bison futé bien inspiré ! Le chemin large sans difficulté laisse place à un sentier nettement plus confidentiel, dans la tourbière, les arbustes et en se faufilant entre les rochers, la vue sur les sommets est bien dégagée. Quel bon plan, quel bonheur de retrouver une nature préservée, sans croiser âme qui marche. Ce détour de 3 kilomètres permet aussi d’apercevoir le rocher de la chaire depuis le haut. La brume est encore bien épaisse, nous prenons le temps de monter au sommet et savourons ces instants de tranquillité. Chose rare aujourd’hui !
La vue vers le Nord : Troppevatnet (lac) au centre entre Løknuten et Troppeknuten
Pour la descente, nous trouvons le sentier principal et des sentes qui rejoignent des plateformes, parfois peu larges qui dominent le sujet de tous les photographes amateurs en quête d’une image un peu moins aseptisée. Il est 7 heures du matin, bonne et mauvaise nouvelle ! La brume se dissipe lentement et nous apercevons quelques trouées, sur une eau d’une couleur “bleu profond” mais le monde commence à débarquer sur le site et une file d’attente de personnes qui se presse pour immortaliser leur présence et réaliser le selfie qui fera office de photo de profil. J’y étais, je partage ! Nous continuons à visiter les lieux en attendant que le ciel se dégage enfin. Nous avons tous nos références cinématographiques, les uns viennent ici pour retrouver les positions de Tom Cruise dans Mission Impossible. Pour ma part, c’est de m’asseoir face au fjord comme Ragnar Lothbrok, chef des vikings, songeant à la destinée de son peuple conquérant.
Cela commence à devenir quasi infernal, le monde débouche de partout comme des centaines de fourmis qui se dirigent vers leur fourmilière. Taïga notre jeune chienne a soudainement pris conscience du danger, l’appel du vide, l’agitation des personnes autour d’elle. Impossible donc de l’amener sur le plateau. Nous allons la garder au-dessus et nous à tour de rôle, y descendre pour savourer ce moment quand même magique, il faut l’avouer. Émotions uniques, comme à l’arrivée la première fois à la gare sommitale du téléphérique de l’Aiguille du Midi. Il faut faire abstraction du monde… En se rapprochant du bord, ne pas se fier aux personnes qui vous entourent, aucune ne connaît les règles élémentaires de sécurité en montagne.
Considérée comme une belle randonnée facile, sans dangers objectifs, cette destination pour 90 % des personnes qui montent est une excursion touristique qui se mérite par un effort et atteindre ce point de vue remarquable est l’aboutissement d’une journée inoubliable.
La danger, les précipices, le vide sont tout autour du roc mais aussi sur les derniers 200 m d’approche. Malgré toutes les consignes de prudence, seule la moitié avait des chaussures de marche adaptées, les plus nombreux en baskets mais certains en chaussures de ville. Et oui, nous avons croisé de drôle de spécimens ! …
Il est 9 heures et demi, nous entamons la descente. Nous sommes dimanche et sommes surpris de la population qui monte à présent, une procession sans discontinuer. Petit sujet de sociologie qui reflète bien les tendances d’un accès à la montagne pour tous. Entre les familles avec des enfants de moins de 3 ans sans porte bébé, ou une autre, le papa avec une poussette sur le sac à dos, bien utile pour gravir les marches népalaises, mais aussi des jeunes personnes torse nus ou en body pour pour les filles, arborant leurs beaux tatouages et leurs baskets encore blanches; de riches arabes en djellaba sacs vuitton en bandoulière; l’amoureux de son bichon blanc installé confortablement dans le sac à dos, mais le plus “dramatique”, ce sont toutes ces personnes que nous avons croisés en difficulté respiratoire, en surpoids pour la plupart, pas conscient et aucunement préparé par l’effort qu’il faut produire pour monter. Sans aucune espèce de critique de notre part, nous avons pour ces derniers, autant d’admiration que d’inquiétude. Mais notre diagnostic n’était pas mauvais, l’hélicoptère n’a pas cessé de tourner toute la journée, nous l’entendions encore de l’autre côté du fjord lors de notre montée vers Soltifjellet. Alors entorse, grosse fatigue ou détresse respiratoire ?
Si au moins cet article peut servir à cela, respecter les notions élémentaires de prudence et préparation de son équipement et de sa condition physique pour une balade “confortable”.
Nous arrivons au parking 5 heures plus tard. Il fait bien chaud aujourd’hui. Nos gourdes sont vides mais pour Taïga, tout au long, les ruisseaux et petits lacs sont fortement appréciés. Nous quittons ce camp de base, heureux d’avoir pu profiter de cet endroit remarquable et pittoresque, à la recherche de quiétude et de tranquillité bien norvégienne pour déjeuner. Les voitures sont bloquées à 3 kilomètres des parkings, ceux-ci étant sur bondés et montent au compte goutte quand les places se libèrent. Direction Forsang et une plage trouvée par hasard, Dørvika, un petit bijou et base de départ pour paddles et kayaks. Lysefjord sans foule reste un spot incroyable.
CARTOGRAPHIE
PREIKESTOLEN EN QUELQUES MOTS
Quelques notions de géologie
Preikestolen s’est formé il y a environ 10 000 ans à la fin de la dernière période glaciaire. Le retrait des glaces provoque la décompression des roches qui se fragmentent. Les éléments climatiques et la gravité érodent la paroi selon les failles de détachement et donnent naissance au promontoire actuel. Certaines de ces failles sont toujours visibles comme celle située à la base de Preikestolen et qui la sépare du reste de la montagne.
Fréquentation
Plus de 100 000 personnes par mois en été, jusqu’à 5 500 par jour. Année après année, les records de fréquentation ne cessent de tomber, plus de 350 000 personnes en 1 an.Mais aussi le nombre de sauvetage. Il y a eu plus de secours en juillet 2022 que tout le reste de l’année.
Une sécurité bien norvégienne
Pas de barrières, pas d’installation en dur autour du site. Pas d’interdiction, mis à part les survols de drones et c’est une bonne chose. Pas de forces de l’ordre non plus . Seul un cabanon à mi-distance de la montée peut faire office d’abri. Les norvégiens ont leur conception de la sécurité, basé sur la responsabilisation, l’expérience sans assistanat. Les autorités considèrent que « l’on ne peut pas clôturer toute la nature du pays », politique soutenue par une population norvégienne plus habituée à cet aspect de « nature dangereuse » que les touristes étrangers. Comme à Oslo où les tremplins à skis sont ouverts au public sans sécurité, ou la baignade est autorisée des berges et des plages sans maître-nageurs.
Accidents et suicides
Les décès dus à une chute sont très rares, mais ils se produisent de temps en temps. La plupart des décès sont dus à des sauts intentionnels, mais on pense également qu’il y a eu 2 ou 3 chutes accidentelles au cours des dernières décennies. La raison est simple, les médias norvégiens ne rapportent pas les suicides présumés. En 2000, une Autrichienne et un Norvégien ont commis un double suicide en sautant ensemble de la falaise après s’être rencontrés sur Internet et avoir formé un pacte de suicide. En octobre 2004, un couple de jeunes Allemands étaient sur le point de commettre un suicide lorsqu’ils ont été interrompus par les autorités. En octobre 2013, un touriste espagnol a été la première victime d’une chute accidentelle ; des éléments ultérieurs ont cependant accrédité la thèse d’un suicide.
Il est en fait un peu difficile pour quiconque de donner des chiffres réels sur le nombre exact de morts en tombant, et combien de ces cas il s’agissait en fait d’accidents. Le terrain sous le plateau rend très difficile la recherche de corps, donc quelqu’un doit voir la personne tomber pour que tout le monde le sache. Et si vous vouliez faire le grand saut, gardez à l’esprit que vous tomberez pas directement dans le fjord en contrebas car l’eau réelle est plus éloignée de la formation rocheuse qu’il n’y paraît, donc toute personne qui tombera atterrira sur des rochers ou des buissons.
Bien qu’une poignée de décès puisse sembler terrifiante, gardez à l’esprit qu’il y a plus de 350 000 personnes qui visitent Preikestolen chaque année. Cela signifie que le taux de mortalité pour 100 000 est bien inférieur à celui de la conduite ou de la plupart des autres activités.
B.a.s.e. jump
Terminons sur un aspect positif du rocher; le paradis pour bases jumper et wingsuiter… pour quelques secondes de pur bonheur et d’adrénaline pour les sauteurs mais aussi pour les personnes présentes sur le rocher lors de l’envol.
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